YONSK

 J’ai commencé à chorégraphier en 2016. Je travaille à ce moment-là en collaboration avec Mel Favre,

sous l’entité artistique Les Sapharides, portée par l’iLiaque en production déléguée. Ensemble nous créons

PUCIE (2020), Jumelles (2022) et la pratique des Fleshdances (pratique dansée émancipatrice souvent

proposé e en non-mixité choisie). Notre travail s’ancre dans une prise de parole féministe, dans la possibilité

de se réapproprier son corps par le mouvement et notamment la vibration des chairs.

Parallèlement à ce travail en duo, je mène mes propres travaux chorégraphiques, au sein de l’iLiaque

toujours. Les recherches autour du solo Bébé débutent dès 2020. La création de ce spectacle en 2023

marque le début de ma carrière artistique solo. Insatiable, plusieurs autres projets protéiformes

émergent assez rapidement dans mon esprit, entretenus par un désir immense de création et d’échanges.

Mon travail artistique s’ancre dans la recherche autour de la figure du Monstre et de la créature, en

tant qu’être hors norme et prodigieux. En découlent ainsi les questions de la représentation du corps

pathologique, du corps malade, plus généralement du corps qui déborde, qui transgresse la norme établie. Il

m’intéresse d’ouvrir les regards sur ces corps-là et de questionner ainsi les notions de normopathie et

d’inclusivité.

Dans ma démarche créative, je porte une grande attention à la place, au positionnement du spectateur,

jouant avec les concepts de voyeurisme, de compersion et d’empathie. Selon les pièces, le public est ainsi tantôt très

proche et au plateau, comme immergé, tantôt en déplacement circulaire autour de la performance, en

action ou interaction avec la proposition artistique. Mes projets s’inscrivent alors sur des terrains de jeu

divers, choisis selon le propos abordé. J’amène le public à se questionner sur la manière dont on regarde

un spectacle, dont on regarde le monde et comment le regard peut devenir politique. J’accorde également

une place très importante à la dimension plastique, esthétique quasi picturale dans mes propositions. Cette

exigence plastique permet de construire un véritable univers dans chacune des pièces, point de départ

duquel peut surgir une charge symbolique profonde. Mon travail s’ancre aussi dans la quête de symboles

du passé, originels. Je cherche perpétuellement à accéder à la racine, à la déterrer, à l'affût d’une forme

de spiritualité qui émanerait du corps. La notion de rituel, m’anime profondément et se manifeste dans mes

créations par l’acte de répétition, la recherche d’un état modifié de conscience comme une porte vers la

transe, donnant à voir l’image d’un corps qui persévère, qui défie ses limites devant l’ordre établi. Pulsions,

compulsions, répétitions, transgressions, contraintes et explosions sont les maîtres mots de mon projet de

création chorégraphique.

Ces différents éléments convergent, dans une volonté de déconstruction des corps, des regards, des

perceptions et des discours établis. Il s’agit de mener le geste à sa fin. Je considère le mouvement

perpétuel comme une valeur essentielle d’expérimentation. Les corps des interprètes projettent, expulsent le

monde du dedans : rêves, peurs, angoisses, désirs. J’attends des corps, y compris du mien, qu’ils disent

l’immédiat, le violent, l’acharnement, la perversité, la vanité, entre héroïsme et fatalisme.

Aujourd’hui, je dirige la compagnie en étroite collaboration avec Mathilde Blottière, chargée de

production.